Par Anne-Marie PLANEL
Paru dans les Mélanges de la Casa de Velázquez, Madrid, n° 51-1/2021
https://doi.org/10.4000/mcv.14661
Cet article fait partie du dossier « Stratégies et procédures d’identification des étrangers (mondes hispaniques-Méditerranée), XVIIe-XIXe siècles », coordonné par Arnaud Bartolomei (Université Côte d’Azur-CMMC, Nice) et Sylvain Lloret (Sorbonne Université-Centre Roland Mounier, Paris). Sa présentation (p. 9-13) et les six articles qui le composent peuvent être consultés en ligne : https://journals.openedition.org/mcv/.
Y est abordée la question des stratégies identitaires des étrangers expatriés sous l’angle d’études consacrées à la matérialité des procédures d’identification mises en œuvre par les États de départ et par les pays d’accueil. Un cadre chronologique et géographique large permet de confronter les expériences de ce type mises en œuvre au sein de la monarchie hispanique à celles pratiquées par les républiques hispano-américaines devenues indépendantes ou par la France, dans ses projections méditerranéennes. Ainsi les éditeurs scientifiques ont fait appel à Anne-Marie Planel pour apporter une comparaison entre les mondes hispaniques et le monde maghrébin.
Depuis la prise d’Alger en 1830, les musulmans et les juifs algériens qui ont trouvé refuge dans la régence ottomane de Tunis peuvent bénéficier de la protection consulaire française, à certaines conditions et s’ils en font la demande. Peu d’entre eux acceptent d’être ainsi immatriculés. Mais en 1865, la déclaration de Napoléon III selon laquelle les Arabes d’Algérie sont désormais des nationaux français, et non plus des sujets, leur fait espérer « le droit d’avoir des droits ». La reconnaissance juridique d’une appartenance nationale française n’autorise pas les colonisés algériens à devenir collectivement des citoyens français. Elle provoque pourtant un conflit de souveraineté entre le consulat français et le bey de Tunis, dont les Algériens immatriculés français sont les victimes : certains sont expulsés par le gouvernement tunisien vers l’Algérie française, d’autres sont « dénationalisés » par le consulat, s’ils continuent à vivre au sein de la « nation tunisienne ».
Mots clés : Algériens, arabophile, France, Islam, nationalité, Tunisie
This article is part of the dossier “Strategies and procedures for identifying foreigners (Hispanic worlds-Mediterranean), 17th-19th centuries”, coordinated by Arnaud Bartolomei (Université Côte d’Azur-CMMC, Nice) and Sylvain Lloret (Sorbonne Université-Centre Roland Mounier, Paris). Its presentation (p. 9-13) and the six articles that make it up can be consulted online: https://journals.openedition.org/mcv/.
It addresses the question of identity strategies of expatriate foreigners from the perspective of studies devoted to the materiality of identification procedures implemented by the sending and receiving countries. A broad chronological and geographical framework allows us to compare the experiences of this type implemented within the Hispanic monarchy with those practiced by the Spanish-American republics that became independent or by France, in its Mediterranean projections. Thus, the scientific editors have called upon Anne-Marie Planel to provide a comparison between the Hispanic worlds and the Maghrebin world.
Since the capture of Algiers in 1830, Algerian Muslims and Jews who have found refuge in the Ottoman regency of Tunis could benefit from French consular protection, under certain conditions and if they requested it. Few of them agreed to be so registered. However, in 1865, Napoleon III’s declaration that the Arabs of Algeria were henceforth French nationals, and no longer subjects, brought them hopefor “the right to have rights”. The legal recognition of a French national affiliation did not allow the Algerian colonised people to become French citizens collectively. However, it provoked a conflict of sovereignty between the French consulate and the bey of Tunis, of which the French-registered Algerians were the victims: some were expelled by the Tunisian government to French Algeria, others were “denationalised” by the consulate, if they continued to live within the “Tunisian nation”.