L’IRMC organise, le 16 janvier 2025 (17h30), une conférence de Jean-Pierre Cassarino intitulée Migrations et culte de la force : Une stratégie normalisée ?
Résumé
Au Nord comme au Sud, il est frappant d’observer le degré croissant de convergence entre les politiques des États en matière de contrôle des flux migratoires. Depuis plus de deux décennies, on assiste à la normalisation généralisée de pratiques visant à refouler les migrants, à les contraindre à une forme d’immobilité spatiale, voire à les bloquer à la frontière au moyen de mesures visant à endiguer les flux ou à enfermer les étrangers dans des camps. La « gestion » des migrations internationales, établie formellement depuis le début des années 2000, serait-elle contre les migrants et les demandeurs d’asile ? Cette question est loin d’être fortuite si l’on prend en considération la prolifération de lois visant à criminaliser les migrants en situation irrégulière, sous couvert de lutte contre la traite des personnes, ou encore la diffusion de mécanismes arbitraires permettant de présumer que des demandes d’asile seront infondées par le simple fait qu’elles émanent de ressortissants de pays dits « sûrs ».
Les pays du Maghreb central (Algérie, Maroc et Tunisie) ne font pas exception. Dans un contexte global de remise en cause des principes et conventions internationaux sur lesquels se fondent les droits des migrants et demandeurs d’asile, les gouvernements de ces pays ont, à l’instar de leurs voisins européens, développé des dispositifs administratifs limitant l’accès des étrangers au droit de séjour sur leur territoire, aux soins, ainsi qu’à la protection internationale. À l’échelle du continent africain, les pays d’Afrique du Nord sont les plus impliqués dans la coopération en matière d’expulsion des étrangers en situation irrégulière. De nombreux accords, formels et informels, ont été conclus aussi bien avec des pays européens qu’avec des pays africains. Ces développements illustrent un alignement progressif des pays d’Afrique du Nord sur la sécurisation croissante des politiques migratoires. Ils dénotent également l’ascendant du pouvoir exécutif sur le pouvoir législatif puisque l’ensemble des dispositifs et mesures adoptés émane rarement de débats parlementaires. Enfin, ces développements s’accompagnent d’une banalisation de la violence à l’encontre des étrangers, si forte que dénoncer la brutalité des mauvais traitements et les injustices dont ils sont victimes ne suffit plus pour inverser la tendance.
En se référant au cas des pays du Maghreb, cette intervention vise à comprendre si la violence est constitutive des politiques migratoires. Résulte-t-elle d’un cadre d’action politique plus complexe où la violence à l’encontre des étrangers s’avère être la conséquence logique de dynamiques nationales et internationales plus profondes et structurantes ? En somme, de quoi est-elle le nom ?