L’IRMC, l’Ambassade de France en Libye et Orient Méditerranée (UMR 8167) organisent, les 17, 18 et 19 novembre 2025 à Tunis, un colloque intitulé Patrimoine matériel (archéologique et manuscrit) et immatériel en Libye et dans les pays voisins : situations contemporaines et perspectives.
L’appel à communications est ouvert jusqu’au 21 juillet 2025, à l’attention des chercheurs, universitaires, étudiants, acteurs de la société civile ou des fondations.
Appel à communications
Les politiques de gestion, de préservation et de valorisation du patrimoine, au Maghreb en général et en Libye en particulier, sont des sujets sur lesquels chercheurs, spécialistes du patrimoine et États se penchent de manière constante depuis le XIXe siècle pour l’archéologie antique, tandis que les périodes ultérieures font l’objet de travaux plus récents.
Ce colloque vise à penser à nouveau frais les études et actions sur les patrimoines archéologiques, manuscrits et immatériels en Libye. Il s’agit d’une part d’identifier les défis auxquels les communautés scientifiques (archéologues et historiens en premier lieu), ainsi que les autorités politiques et ONG, se trouvent confrontées concernant cet héritage culturel. D’autre part, le colloque sera l’occasion de mettre en lumière le travail des nombreux acteurs qui interviennent dans le champ de la conservation patrimoniale, à des niveaux différents et selon des légitimités variées. Il s’agira d’étudier leurs relations et les avancées vertueuses qu’elles permettent, ou les stagnations qu’elles provoquent. Le colloque permettra de souligner les dynamiques en cours quant à la mise en valeur de sites ou d’objets considérés comme patrimoniaux, notamment grâce aux nouvelles technologies de sauvegarde et de documentation, et ce à travers un échange entre chercheurs, experts et divers acteurs engagés dans les domaines du patrimoine.
Il ambitionne également de constituer un espace de réflexion prospective sur la protection et la valorisation du patrimoine culturel dans la région au regard des différents outils de financements disponibles.
Trois axes principaux sont proposés, et l’appel reste ouvert à toute problématique en lien avec le thème général du colloque.
Axe 1. Le patrimoine archéologique en Libye et dans les pays voisins : situations contemporaines et perspectives
Au-delà d’un état des lieux du corpus archéologique libyen, il s’agira de mettre en regard l’histoire des sites et des campagnes archéologiques à travers le temps. Les sites emblématiques, notamment ceux inscrits au patrimoine mondial (Leptis Magna, Cyrène, Sabratha, Ghadamès, montagnes de l’Akakus), reflètent la diversité culturelle et civilisationnelle du pays (punique, grecque, romaine, byzantine, islamique, amazighe, ottomane…), tout comme ils témoignent des choix scientifiques et politiques qui ont été promus à différents moments d’une histoire coloniale, nationale ou post-coloniale. Les interventions portant sur des exemples voisins seront les bienvenues (Tunisie, Algérie, Maroc, Égypte, Soudan, Tchad).
Le comité scientifique prendra en considération de manière prioritaire les communications portant sur les thématiques suivantes :
- État de conservation des sites archéologiques (érosion naturelle, négligence, impact des conflits armés, pillage, trafic illicite…). Les questions de recherches sont nombreuses : urbanisation anarchique, manque de financements et d’expertise locale, législation insuffisante ou non appliquée, gestion difficile des sites éloignés, faible ancrage du patrimoine dans la conscience collective…
- Travail de protection du patrimoine archéologique tel qu’il est mis en œuvre par les institutions publiques (département des Antiquités, ministère de la Culture…), les missions archéologiques locales et internationales, les ONG, les organismes mondiaux (UNESCO, ICOMOS), sans oublier l’étude des processus d’inscription sur la liste du patrimoine mondial en péril…
- Impact des conflits sur les politiques patrimoniales, et la question de la conduite des terrains, soient-ils des terrains de fouilles ou des terrains de recherche, en temps de conflit ou de tensions. Étude sur les pratiques de pillage et de restitution des pièces archéologiques. Pratiques promues par l’observatoire international du trafic des biens culturels mis en place par l’ICOM (International Council of Museums).
- Perspectives de développement de la gestion du patrimoine et son intégration dans les stratégies nationales ; également sur la valorisation de sites méconnus, la formation continue de professionnels (archéologues, techniciens, restaurateurs…), et l’utilisation de technologies modernes (numérisation, scan 3D, intelligence artificielle – IA – pour la surveillance environnementale, musées interactifs, tourisme culturel, éducation patrimoniale…).
- Restitution des pièces archéologiques volées, et la destruction systématique du patrimoine en temps de guerre ou par des actes terroristes.
- Place et représentations des sites dans la vie concrète des populations avoisinantes
Axe 2. Les manuscrits : des trésors de savoir menacés par l’oubli et la dégradation
Ce thème ouvre le débat sur la possibilité d’inventorier les manuscrits médiévaux en Libye et dans les pays voisins. Il s’agira de présenter une estimation des fonds disponibles, les centres ou les bibliothèques accueillant ces manuscrits (Centre des archives et études historiques, bibliothèque de la Zawiya Abdel Salam al-Asmar, bibliothèque Ahmed Pacha Qaramanli, etc.), et les conditions difficiles de conservation dues aux menaces (climat, insectes, négligence, manque de moyens, trafic, conflits…).
Dans une perspective de recherche-action, il est possible d’affirmer que ces manuscrits sont une des sources de mémoire collective, et qu’ils constituent une image que les sociétés souhaitent parfois entretenir. Ils sont parfois valorisés dans les domaines éducatifs, culturels voire touristiques. Des exemples et approches innovantes pourraient être présentés en ce sens.
Le comité d’organisation prendra en considération de manière prioritaire les communications portant sur les thématiques suivantes :
- Travail de conservation institutionnel : projets de documentation, numérisation, archivage, initiatives locales ou internationales (numérisation de Tombouctou, projets de l’UNESCO…), et rôle des universités et des centres de recherche. L’accès à ces manuscrits pour les chercheurs s’avère crucial, tout comme leur valorisation, leur traduction et leur signalement.
- Conservation des bibliothèques familiales : rôle des milieux scientifiques et des élites intellectuelles (hors institutions académiques) dans le repérage, la documentation et la transmission de manuscrits familiaux ou religieux. Quels réseaux ?
- Présentation des parcours de figures intellectuelles ayant marqué ce champ par leurs contributions.
- Cadre juridique et législatif encadrant la protection des manuscrits : interroger les lois qui existent à l’échelle nationale ; estimer la possibilité de les mettre en action par les institutions qui en sont responsables.
Axe 3. Transformations sociales et constitution d’un patrimoine immatériel
La Libye a récemment rejoint la Convention de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Que recouvre cette appellation, et comment est-elle adoptée en Libye ?
À travers des exemples précis – collectes de traditions populaires (contes, proverbes, poésie populaire…), consignation de rituels et fêtes (danses, chants, spectacles…), musiques et modes, artisanats et savoir-faire traditionnels, cuisine locale, pratiques agricoles ancestrales, coutumes sociales –, les présentations sont invitées à traiter de la question du contexte et des modalités de la collecte. Si ces exemples permettent d’analyser l’impact des changements sociaux et culturels que connaît la société libyenne, et les raisons de ces transformations, ils renseignent également sur certaines valeurs passées qu’il semble bon de valoriser. Quels sont les objectifs souhaités par ces recensions ? En effet, les transformations des modes de vie en milieu urbain, les migrations internes et externes, les évolutions des dialectes locaux, la désaffection des jeunes pour les métiers traditionnels et l’influence extérieure sur les arts sont autant de facteurs à prendre en compte dans l’émergence d’un intérêt pour des traditions qui tombent en désuétude.
Le comité d’organisation prendra en considération de manière prioritaire les communications portant sur les thématiques suivantes :
- Rôle des institutions dans la stratégie de sauvegarde du patrimoine, limites et contraintes dans lesquelles elles évoluent, ainsi que leurs défaillances. Il convient également d’appréhender le rôle joué par la société civile, et certains individus en particulier, dans la sauvegarde et la transmission de ce patrimoine (éducation, politiques culturelles…).
- Rôle des initiatives privées telles que les collectes de récits populaires, l’organisation de festivals culturels, les enregistrements sonores ou audiovisuels, et le recours à la technologie numérique (applications mobiles, bases de données, courts-métrages, podcasts, jeux éducatifs…).
- Lien entre patrimoine immatériel, tourisme culturel et industries créatives (design, cinéma, arts vivants…), qui visent au renforcement de l’identité collective (nationale ?).
- Collaborations muséales : à quels niveaux les collaborations se font-elles ? Quels types de musées ? Pour quels publics ?
Informations-clés
Date et lieu : 17, 18 et 19 novembre 2025, à Tunis.
L’appel s’adresse aux chercheurs, universitaires, étudiants, acteurs de la société civile ou des fondations.
Les propositions doivent être envoyées exclusivement via ce lien : https://forms.gle/P6yiC4juHmCnX9ME9
Date limite d’envoi des propositions : 21 juillet 2025.
Les résultats de la sélection seront communiqués au plus tard le 25 juillet 2025 à l’adresse e-mail mentionnée dans le formulaire de participation.
Comité scientifique
Hafedh Abdoulli (archéologue, historien, Université de Sfax)
Katia Boissevain (anthropologue, directrice de l’IRMC)
Sébastien Garnier (historien, Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne)
Vincent Michel (archéologue de l’Antiquité classique d’Orient, directeur de la mission archéologique française en Libye)
Neila Saadi (sciences du Patrimoine, Université de Tunis, chercheure associée à l’IRMC).